L’étrange festival de Strasbourg, 13ème édition

JOUR 4

God, the Devil and Love (+ Lonely Planet Guide to ShitCity)

Meurtre sous contrôle (en VO signifiante God told me to) est un thriller théologique à tendance fantastico-raëlienne. Et vous me ferez pas croire qu’il en existe un autre.
Ca se passe (encore) à New York, en 1975 c’te fois, où des gens a priori normaux se mettent à dégommer leurs prochains en masse, prétendant que c’est Dieu qui le leur a demandé, Monsieur le Juge. Le héros, un flic rital genre cousin d’Al Pacino, découvre assez vite que ces serial killers d’après la messe ont été en contact avec un drôle de zozo, dont le signalement colle étrangement avec celui du Christ. Chevelu, nu-pieds, né d’une mère vierge, mais hermaphrodite à sa naissance et disposant d’importants pouvoirs psychiques, cet insaisissable mentor est-il le Messie revenu nous sauver ? C’en est trop pour notre détective catholique, qui ira jusqu’à mettre sa carrière en péril pour prouver qu’il s’agit bien plutôt… d’une entité extraterrestre.
Ce film aliénoïde paranoïaque est signé Larry Cohen, créateur, entre autres, de la série Les Envahisseurs. Une des ficelles du scénario est à mon avis tout à fait crétine mais l’histoire retombe sur ses pattes pour une chute honorable. Les persos sont bons, il y a un passage à Harlem sans vrai enjeu, juste pour mater des afros et des cols pelle à tarte, et étonnamment peu de manichéisme pour une série B christianisante.

Next stop : ShitCity. Là où il fait bon vivre. Là où chacun de vos étrons est remboursé en drogues laxatives et hallucinogènes. Là où votre carte d’identité infalsifiable est une puce électronique insérée dans l’anus. Désolé pour les plus scatophiles d’entre vous mais, au-delà de ce très beau décor de SF, le métrage d’animation coréen Aachi & Ssipak est avant tout un film d’action. La merde reste en toile de fond.
Le traitement visuel est plutôt inattendu, avec des décors de synthèse hyperréalistes dans lesquels évoluent des persos en 2d au design à mi-chemin entre DBZ et les Incrédibles. Quant au montage, j’ai rarement vu quelque chose d’aussi épileptique.
Point noir : une certaine tendance à la reprise / parodie / citation de codes ou de séquences de grands classiques, manie qui commence à sérieusement saturer le cinéma bis. Points rouges et bleus : deux concepts de personnages grandioses. Si les héros éponymes manquent d’intérêt dans les bastons – et Dieu sait s’il y en a – leur fadeur est largement rattrapée par une paire d’adversaires . D’abord Gueco, sorte de cyborg dandy increvable, un peu Terminator, un peu Inspecteur Gadget, liquidant en moyenne dix ennemis par plan (d’une durée moyenne de deux secondes), souvent la tête en bas, à 200 sur l’autoroute, au milieu d’un explosion. Et puis, surtout, les Diaper Boys, petits mutants constipés se déplaçant par groupes de cent et qui n’arrêtent pas de calancher. Ce serait comme des schtroumfs, sauf qu’ils porteraient des couches-culottes sur la tête et qu’ils seraient cons comme des lemmings. Idée toute simple, mais absolument jouissive que de montrer ces petites crevures se faire sauter le caisson à longueur de péloche.

Et on boucle sur End of the line, un survival canadien petit budget.
Ca se passe une nuit, dans le métro de Montréal. Des pagers sonnent dans le sac de certains passagers qui, découvrant leur message, dégainent des couteaux-crucifix et émincent leurs voisins. Pour les sauver, disent-ils. C’est que l’Apocalypse est arrivée…
Pas original ? Sans doute. Mais ce film a le mérite d’être complètement premier degré, scénarisé-produit-réalisé très correctement par un petit jeune qui en veut, très bien interprété et plutôt rusé dans son développement. Le récit travaille sur le huis clos, sur les interactions entre personnage, et n’hésite pas à amaigrir le casting avec brutalité. Au-delà du parti pris millénariste outrancier, un vrai soucis de réalisme guide les scènes d’action. Suspense, rebondissements, flips de groupe et dénouement aux petits oignons.
Sortira en salle, sortira pas ? L’avenir le dira. Mais dans la famille ‘film de genre contemporain’, c’est à la fois orthodoxe et regardable. Ce qui n’est pas si banal.

L’avalanche de bidules annexes a failli m’ensevelir.
The Eel est un exercice en caoutchouc : un aquarium, un encéphalogramme, une anguille. Puis BOUH.
The Demonology of desire explore le rapport de jeunes adolescents à l’amour et au sexe, avec un démon pas si métaphorique que ça dans le garage. Les jeunes acteurs sont pas bien calés mais le scénario est carrément troublant, genre Ghost World meets The Thing.

Ensuite, fournée de cartoons. Le pédalo c’est bô, une bêtise des réalisateurs de Pic-pic et André, inspiré par Tex Avery mais en pas drôle. Guide Dog, au chouette dessin crayonné et super expressif. Et puis, Intolérance, le petit bijou de Phil Mulloy, qui vous est présenté par Jérôme ailleurs sur ce site, à l’occase de sa sortie DVD : à voir.
Enfin, deux traitements fictifs d’un même fait divers US, l’histoire de Ricky Kasslin, jeune dealer qui déterrait des cadavres et finit par éventrer un de ses potes pour l’anniversaire de Lucifer. My sweet Satan est la lecture de Jim Van Bebber, court en vidéo un peu approximatif mais tout à fait lisible et illustratif. Where Evil Dwells est à peu près son contraire : présenté dans le désordre de ses rushs, c’est la version “Cinéma de la Transgression” (cf. hier) de l’histoire. Il y a un grand huit, Hells Bells d’ACDC en boucle, Joe Coleman incarne le Diable et les scènes de famille façon Manson sont si mal captées qu’on pourrait croire à un reportage sur les authentiques bas-fonds du satanisme. Ce que c’est peut-être. Sans aucun doute le segment le plus Etrange de ce Festival.

Léo

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