Darkness fanzine n°11

Le fanzinat n’est pas mort. Grâce à Darkness Fanzine, il montre même une fraîcheur exceptionnelle. La revue propose un angle de vue inédit et une originalité d’analyse sur la violence et la censure au cinéma.

Christophe Triollet, rédacteur en chef et auteur de la plupart des textes, a eu la bonne idée d’utiliser son bagage en droit pour étudier les mécanismes sociologiques et politiques qui font qu’un film se retrouve interdit, flanqué d’une limite d’âge ou coupé de certaines séquences. La plupart du temps, les textes sont très intéressants même si l’auteur s’emporte (rarement) dans une tirade digne d’un plaidoyer avec du namedrop d’articles de loi.

Après deux textes qui ne font que survoler le thème – les souvenirs de Norbert Moutier et la figure du mal – nous plongeons dans le vif du sujet avec “la violence est parmi nous”  qui fait office de réelle introduction. L’article explique que dès le début du cinéma, il y a eu des restrictions afin de protéger la population. L’auteur aborde l’influence que peut avoir le cinéma sur certaines personnalités. Il cite les cas de personnes qui se sont inspirées du cinéma pour commettre des méfaits. Pour autant, le lien entre violence cinématographique et passage à l’acte reste encore à établir.
Avec “provocation, mimétisme et confusion”, Lionel Trélis poursuit l’analyse de l’influence de certains films comme Orange mécanique, Scream, Fight club ou le célèbre Tueurs nés.

“Violence, cinéma et censure : France – Chine” compare la représentation et l’acceptation de la violence entre les deux pays. Forcément, les deux cultures font que la violence y est appréhendée de manière totalement différente (opposée ?) au cinéma.

L’auteur fait ensuite la part belle à la commission de classification des oeuvres cinématographiques en décrivant et en décryptant son fonctionnement. Cette institution délivre les visas d’exploitation et décide d’éventuelles interdictions à une catégorie d’âge. On y trouve un entretien avec Sylvie Hubac, qui fut à la tête de la commission pendant six ans.
Christophe Triollet détaille chaque catégorie d’interdiction, pas aussi simple qu’on pourrait le croire, et donne des exemples de films avec les motivations de l’interdiction. Albert Montagne ajoute un passage sur les “films X d’incitation à la violence, une censure méconnue du cinéma français”, avec le détail des films qui ont été “ixifiés” à cause de leur violence et non à cause d’un contenu pornographique.

“La violence au cinéma” se propose d’analyser les différents types de violence et comment elle évolue avec les âges. Elle peut être frontale (du gore, des meurtres) mais aussi psychologique ou suggérée, sans que l’impact soit moindre.

Un gros plan est fait sur le cas de plusieurs films qui ont eu des démêlés avec la commission de classification. Antichrist, qui a dû faire face à une plainte d’une association mais le ministre de la culture a simplement mis une interdiction aux moins de 16 ans assorti d’un avertissement. Pourtant le film est vraiment “hard”.
L’auteur fait aussi une belle analyse du coup de pub pour la sortie de Martyrs de Pascal Laugier, dont le scandale semble avoir été bien organisé grâce à un plan médiatique.

L’auteur principal du fanzine livre encore deux textes très intéressants sur “la censure et l’autocensure” ou comment les réalisateurs font des coupes à la source pour satisfaire les producteurs ou minimiser les risques financiers. Il fait aussi le constat de films français de plus en plus sages. Les télévisions étant impliquées dans le financement des films, elles privilégient les films susceptibles de faire une grand audience en première partie de soirée. Le deuxième texte se concentre sur les affiches de films que l’on peut voir dans la rue. Il évoque ce que dit la règlementation et donne des exemples d’affiche modifiées pour ne pas poser de problème.

En guise d’articles plus légers à picorer, on pourra lire l’article de Didier Lefevre, rédac chef de Médusa, qui nous annonce que le film d’horreur au sens classique est mort et que ses successeurs, comme les torture-porn, sont loin de déranger malgré l’exposition de barbaque. On trouve également quelques textes déjà publiés par ailleurs mais réactualisés par leurs auteur. Ainsi Olivier Mongin, avec “les nouvelles images de la violence”, propose un panorama de la violence dans le cinéma des années 90. “Violence et cinéma” de Jean-Baptiste Guégan, fait le point sur la stylisation de la violence, dans le cinéma de John Woo ou celui de Tarantino, avec Kill Bill par exemple.Le livre se conclut par une liste et un petit historique des revues interdites et un récapitulatif des films interdits (-16 ans ou -18ans) de 2004 à 2009.

On attend avec impatience le numéro de 2011 qui sera consacré au sexe et à la censure au cinéma !

72 pages, format A4, n&b avec couverture couleur. 8 EUR. Le fanzine a eu beaucoup de succès et le premier tirage est épuisé. Cependant, il sera disponible à nouveau chez Sin’Art.

1 commentaires sur “Darkness fanzine n°11”
  1. Merci Jérôme pour cette très belle tribune. Le premier tirage du 11ème numéro de Darkness Fanzine a rapidement été épuisé. Sin’Art, mon éditeur et diffuseur, a donc été dans l’obligation de procéder à un second tirage.

    Une belle récompense pour un fanzine en sommeil depuis plus de 20 ans. Le prochain numéro est en construction et devrait être – également – un très bon cru…

    Pour commander Darkness #11 via Internet :
    http://www.sinart.asso.fr/recherche/23980

    Pour l’acheter en boutique à Paris : Gotham ou Movies 2000.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.