Les petits mouchoirs Vs Predator

Okay, pour ce film-clash il va falloir établir quelques règles, ne pas jeter les concurrents tous nus dans l’arène & s’accorder sur un arbitrage viril mais correct. C’est pas tous les jours que Cinétrange boxe dans cette catégorie.

Bien que tout soit possible dans un univers ou la lumière est à la fois ondulatoire et corpusculaire, l’issue des combats à mort semble ici prévisible, même dans la catégorie seconds rôles. Les paris sur un match Gilles Lellouche / Sony Landham, n’iront pas à la chemise col relevé. Un Marion Cotillard vs. Arnold Schwartzeneger fait peu de doute quant à son issue, même en autorisant morsures et cris stridents. Quant à Magimel, bien que s’étant musclé façon Gérard des Filles d’à côté (bel effort, Ben), on dubite qu’il tienne deux rounds contre le Predator désarmé… La contrainte sera donc : des bisous, des bisous, des bisous. Au lieu de dresser Canet contre McTiernan, les enfermer dans un ascenseur le temps de cette chronique et voir quel genre de rejetons ils peuvent nous pondre.

Et là, surprise, les points communs sont si nombreux qu’on finit par peiner à distinguer l’un de l’autre. Dans les deux cas, un grand moment de cinéma sur les liens de camaraderie à l’âge des premiers cheveux qui tombent, des premiers poteaux qui meurent.
Ici comme là, une bande de vieux potes quitte le confort de son train-train (le Paris des velibs, un camp de mercenaire du Nevada) pour une longue promenade dans la nature en fête, des lieux exotiques et mal définis (le Cap-Ferrat, la jungle guatémaltèque). Dans ce milieu neuf et déroutant (pas de panier de légume bio, des scorpions mangeurs d’hommes), les tensions secrètes crèvent et dégénèrent en querelles. Il faudra l’arrivée d’un autochtone (breton pied nu, monstre de l’espace) pour rétablir la confiance de tous envers chacun (scène d’enterrement tire-larme, écorchage et crevage d’organes). Dans les deux récits, le sujet de l’homosexualité masculine est abordé avec délicatesse (« J’aime tes mains » / « Bon dieu, vous êtes qu’un ramassis de lopettes ici ! « ) et, malgré (ou grâce à) de poignantes tensions narratives, les déclarations à cœur ouvert ne manquent pas (« T’es vraiment une belle personne, Ludo. Je suis fière d’avoir été ton amoureuse. » / « Les excuses, c’est comme le trou du cul, tout le monde en a ! »).
Enfin, dans chacun des films, le récit évolue vers un happy end en demi-teinte, dans lequel le Bien triomphe de la Vilainie, malgré l’inéluctable de la mort et la préséance du Mal.

« Un, deux, trois… Soleil ! SOLEIL ! »

Le spectateur le plus attentif ne manquera cependant pas de pointer quelques différences entre les deux œuvres, à commencer par leur année de réalisation (2010 / 1987), leur longueur absolue (154 mn /107 mn), leur durée relative (154 mn / 107 mn), le nombre d’interludes musicaux proposés (10 / 0) et la quantité de scènes de mitraillade au minigun dans le sous-bois (0 / 1).
L’antériorité du film de McTiernan laisse ouverte une possible influence de son travail sur celui de Canet. Les tours de forces stylistiques de ce dernier semblent cependant citer plus nettement le travail d’un Gaspard Noé (plan-séquence caméra à l’épaule dans la boîte de nuit) ou d’un Michael Bay (travelling tournant autour de la face burinée de Jean-Louis l’autochtone).
On notera pour terminer que, si Les Petits mouchoirs (titre ésotérique) compte à son casting une actrice oscarisée, Predator (titre exotérique) s’offre un recordman de tour de biceps. Je dis : ça se se vaut.

« Toi, t’as pas une gueule de porte-bonheur ! »

Dans notre impartialité légendaire, nous décernons donc un point partout.
En attendant (impatiemment) l’hypothétique match retour autour des Petits Mouchoirs 2 vs. Alien vs. Predator 2 (Marion Cotillard in space ?) Et pour ce sequel, espérons que Canet aura la bonne idée de nous recruter un Gérard Jugnot ou un Danny Boon histoire de combler dans la dignité le vide laissé par le décès du personnage de Jean Dujardin.

    1 commentaires sur “Les petits mouchoirs Vs Predator”
    1. La meilleure (ou la pire c’est selon) scéne: le sable jeté in-extremis sur le corbillard. Canet se surpasse. je pensais que Ne le dis à personne était un des pires films du monde. Les petits mouchoirs réitère l’exploit en beauté. Franchement à côté Besson est un génie.

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