L’étrange créature du lac noir

Tous les cinéphiles amoureux de l’âge d’or du fantastique vont se ruer sur le magnifique coffret Universal en forme de cercueil regroupant 8 grands classiques incontournables : la momie, Dracula, Frankenstein, la fiancée de Frankenstein, l’homme invisible, Le loup garou, Le fantôme de l’opéra et  bien sur L’étrange créature du lac noir qui me touche plus particulièrement. Mais avant d’évoquer le très beau film de Jack Arnold, j’aimerais quand même vanter la restauration en blu-ray de ces films enfin dispo dans des copies absolument splendides. Le grain de l’image est magnifique, l’étalonnage est quasi parfait. Un miracle.

4.0.1

Parallèlement à l’édition blu-ray, La créature du lac noir ressortdans une version 3D dans les salles obscures. Pour les plus jeunes d’entre vous, sachez que cette petite perle du cinéma de genre bénéficiait déjà à l’époque de la technique du relief. Dans les années 80, le film fut même diffusé à la dernière séance. Pour voir la créature sortir de votre minuscule écran de télé, il fallait se procurer les lunettes dans les télé7 jours. Trêve de digression !  Et le film dans tout ça, que vaut-il 58 ans après sa réalisation ? Sans forcer l’aspect nostalgique, L’étrange créature du lac noir est une formidable série B qui parvient à s’élever largement au-dessus du film de monstre standard grâce au regard humaniste que pose Jack Arnold sur sa créature. En reprenant grosso modo la trame narrative de King Kong, les scénaristes ont judicieusement  choisi d’éviter l’effet choc à tout prix. Les effets spéciaux supportent mal le poids des années. La créature n’est pas très terrifiante aujourd’hui. Et ce n’est pas les accords insistants de la musique sur l’avant bras du monstre ou sur son visage qui risquent de changer quelque chose. Ni les hurlements de l’héroïne.

En revanche, le point de vue adopté par les auteurs privilégie l’émotion, en témoigne cette séquence toujours aussi émouvante où la créature nage à côté de la jeune femme. Il la contemple sans chercher à l’attraper,  l’observe religieusement et épouse sa nage sans la déranger. Une forme de chorégraphie érotique se déroule sous nos yeux. Ce moment de répit  quasi-poétique, touche par sa grâce visuelle. Plus le récit progresse et plus le monstre écailleux devient attachant. A contrario, les personnages humains se révèlent de plus en plus déplaisants à une ou deux exceptions près.   A l’instar de King Kong, le message est clair. Le bourreau devient la victime de la bêtise humaine, de sa soif idiote de découverte et de conquête. Rien ne serait arrivé si on l’avait laissé en paix.

Avec un tout petit budget, Jack Arnold n’évite pas les pièges du cinéma de monstre : prologue un peu longuet  plombé par des dialogues pseudo-scientifiques plutôt archaïques, personnages archétypaux très peu intéressants. Le déroulement de l’histoire linéaire et sans surprise n’est finalement pas l’intérêt de ce petit classique très bien réalisé bénéficiant de magnifiques décors naturels, de splendides séquences maritimes et d’une photographie brumeuse tout à fait adéquate. D’ailleurs le film est sorti à l’époque dans une version colorisée (bleutée) et en 3D bien sûr. Jack Arnold signera néanmoins à mon sens deux films supérieurs. L’excellent Tarantula, trépidante histoire d’araignées géantes et surtout l’homme qui rétrécit, chef d’œuvre absolu du fantastique d’après le roman génial de Richard Matheson.

L’étrange créature du lac noir engendrera deux suites. Le retour de la créature du lac noir, toujours réalisée par Arnold et La créature est parmi nous, de John Sherwood. Jack Arnold a été, entre 1953 et 1959, un grand artisan de la série B. Ensuite, il est passé au petit écran et il est devenu l’un des réalisateurs les plus prolifiques de séries tels que Le virginien, Au nom de la loi, Buck Rogers, L’île aux naufragés et enfin La croisière s’amuse dont il réalisa tout de même 8 épisodes. Il faut savoir aussi que deux comédiens ont enfilé le costume de la créature. Dans l’eau il s’agit de Rico browning qui a été embauché pour ses qualités de nageur et pour sa capacité à rester quelques minutes sous l’eau sans respirer. Tout le monde s’en fout mais il deviendra par la suite le réalisateur attitré de Flipper le dauphin.

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