Invisible Invaders

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L’homme dans son inconscience persiste à manipuler l’atome et à profaner le ciel de ses fusées. Ne va-t-il point être puni par la terre elle-même un jour prochain, voire s’exposer à un Père Fouettard venu d’ailleurs (de l’espace… entre les espaces, d’après une citation restée célèbre) qui le remettra à sa place ? La sanction se manifeste en de terribles adversaires, des envahisseurs… invisibles ! Je vois que vous avez suivi. John Carradine vêtu d’une blouse blanche est aussitôt désintégré par une explosion atomique l’on ne sait trop comment. Voilà où nous mène la folie des hommes ! Sacrilège, attendez voir, ils ont annihilé John Carradine en deux temps trois mouvements, les rustres !

Contre toute attente son cadavre possédé par une force inconnue apparait à un confrère, le docteur Penner. Le défunt est l’émissaire d’une civilisation extra-terrestre qui énonce le marché en termes simples : les terriens doivent se rendre sans attendre où ils seront tous anéantis. Vu que les envahisseurs sont indétectables, l’humanité ne peut l’emporter. Nous ne reverrons plus Carradine après, puisqu’en effet il n’apparaitra que quelques minutes de tout le métrage bien qu’il soit mis en avant sur certaines affiches, un procédé vendeur fort courant.

Revenons à notre atomique narration. Comme personne ne veut croire le dit savant, les avertissements suivants seront rendus publics par des cadavres ambulants qui s’emparent des micros des speakers des stades de football et préviennent la foule de l’imminence de l’invasion. Mettant leur menace à exécution, les envahisseurs investissent des cadavres qui se relèvent et sabotent les infrastructures stratégiques. Un vétéran de Corée, Penner, sa fille et un confrère se réfugient dans le bunker Numéro 6 (Numéro 6, vous dites ?). Ce quatuor, dernier rempart du monde libre, recherche une ultime solution pour contrecarrer l’attaque alors que les macchabées déambulent tout autour et que les autorités sont sur le point de céder.

L’esprit particulièrement naïf de la SF 50’s imbibe le métrage de Edward L.Cahn. La galerie de héros semble issue d’un folklore inamovible. Nous avons donc le militaire remplit de sang-froid et de courage en toute circonstance, le vieux sage, la fille qui sert de jolie tenture dans le cadre (ce qui était hélas le lot de ces dames dans la majorité des productions susdites) et un scientifique séduisant mais qui aurait presque tendance à pactiser avec « les voleurs de corps ». Cahn n’a pas pour vocation de révolutionner l’air du temps. Il n’empêche que dans son inspiration délirante, il se présente comme un concurrent sérieux au nonsensique Plan 9 from Outer Space qui sortira cette même année 1959, bien qu’il soit privé de la frénésie loufoque d’Ed Wood. Invisible Invaders est donc un plaisir rafraîchissant même si l’inverse d’une œuvre impérissable ! Pour ainsi dire, les incohérences et situations abracadabrantes abondent et le métrage crie misère. Que cela ne tienne, ce dernier souci sera escamoté par quantité de stock-shots. Il est amusant de constater combien le public de l’époque n’en avait cure. Il y a là une certaine naïveté touchante qui fait peut-être défaut depuis.

Edward L.Cahn, un réalisateur plus que prolifique sur trente ans de carrière, aura œuvré sur le tard dans la science-fiction en tant que pourvoyeur de Craignos Monsters. The She-Creature, Woodoo Woman, Creature with a Atomic Brain, Invasion of the Saucer Men figurèrent tous dans les compte-rendus de Jean-Pierre Putters. Le titre de gloire de Cahn demeurera It ! The Terror from Beyond space, ou Alien vingt ans plus tôt. Dans le rôle du militaire forcément héroïque, naturellement sans tâche, John Agar tient la vedette. Cet acteur fut un habitué du western et même du western à son zénith puisqu’il travailla sous la baguette de John Ford et de Raoul Walsh. Dans le domaine qui nous concerne, Tarentula et Le Peuple de l’enfer marquent sa carrière.

Aussi bricolé qu’il puisse être, Invisible Invaders démontrait qu’avec deux dollars six cents en poche les auteurs modestes des 50’s parvenaient à élaborer des films qui se voulaient de grande envergure… du moins dans les intentions. Ces séries B étaient bondées d’idées naïves et saugrenues toujours soutenues par un sérieux papal et de l’astuce à en revendre. C’est ce qui nous les rend toujours amusantes. Néanmoins, au-delà de son statut de série B cachée dans la masse, Invisible Invaders aura défriché avec quelques compères le chemin qui aura conduit à une œuvre historique : Night of the Living Dead.

 

 

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