Le vagabond de Tokyo de Takashi Fukutani

Le vagabond de Tokyo, c’est Yoshio, la vingtaine et vivant de petits boulots précaires. C’est un peu l’équivalent jeune et japonais du Big Lebowski. Il vit dans une minuscule chambre située dans un HLM, la résidence Dokudami.

Les aventures du jeune Yoshio tournent très souvent autour de la misère sociale : pas de boulot, pas de copine, pas d’argent, et il faut bien survivre. Pour autant, le mangaka ne verse jamais dans le pathos et parvient à être à la fois triste et très drôle. Les situations sont cocasses, parfois tellement incroyables, que l’on ne peut que penser que l’auteur a puisé dans sa propre biographie pour mettre en images ce qui arrive à Yoshio. Le dessinateur Takashi Fukutani lui-même travaillait en dilettante. Il avouait publiquement ne pas aimer travailler et il se mettait à boire. La différence entre Yoshio et Fukutani est donc plutôt ténue. On trouve même des histoires où Yoshio rencontre son dessinateur, ce qui donne lieu à des logorrhées de l’auteur, des questionnements sur sa vie et ses motivations.

La biographie de Takashi Fukutani nous apprend que lui-même est passé par divers petits boulots (à l’usine, dans des kiosques) et même par la case “prison” avant de faire du dessin. Fukutani avait 30 ans dans les années 80 et Le vagabond de Tokyo se déroule durant cette période où l’on peut prendre des boulots à la journée sur des chantiers de construction. Après un carrière prometteuse, Fukutani est sur une pente descendante. Il perd tout intérêt à dessiner, s’enfonce dans la dépression. Il meurt à l’âge de 48 ans après avoir fortement abusé de l’alcool qui lui a détruit le foie, entre autres. Une fin donc assez triste pour l’auteur, dont l’amertume et la mélancolie se ressentent à travers les pages du manga.

L’éditeur Le lézard noir a sorti jusqu’à présent trois volumes du Vagabond, chacun étant une compilation de petites histoires. Tout l’intérêt réside dans les rencontres que fait Yoshio avec des personnages souvent excentriques. Le garçon célibataire ayant la vingtaine, il essaie régulièrement de draguer mais se retrouve dans des situations inconfortables. En outre, Yoshio va faire la connaissance un professionnel du sniffage de culottes usagées, qui a développé des techniques délirantes pour prélever les odeurs et les saveurs des sous-vêtements. Yoshio monte souvent des plans foireux avec des personnages loufoques, tout droit sortis des bas fonds. On retrouve aussi pas mal d’histoires liées au travail même du mangaka (dessinateur de BD au Japon). L’auteur lui-même est passé par l’étape “petite annonce” avant d’être embauché comme assistant auprès d’un dessinateur.

Si le sexe et un certain côté trash/underground sont souvent présents dans le Vagabond de Tokyo, il y a toujours une gravité et un côté sérieux qui évitent à l’oeuvre de sombrer dans l’excès et les extrêmes (gore et porno) que l’on peut trouver dans certains mangas. En d’autres termes, on voit en filigranes à travers des péripéties à priori légères, parfois érotiques ou scatologiques, une dimension sociale et une description de la misère dans tout ce qu’elle a de plus réelle.

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1 commentaires sur “Le vagabond de Tokyo de Takashi Fukutani”
  1. C’est la meilleur bande dessinée du monde. Je n’ai jamais autant rigoler de toute ma vie, et Dieu sait qu’il n’y a plus grand chose de marrant de notre jour (je parle de rire de bon coeur)
    Merci Fukutani sensei, merci du fond du coeur, vous êtes avec les justes.

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