Furie, de Brian De Palma

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L’édition restaurée de Furie en blu-ray et dvd chez Carlotta est l’occasion de réévaluer l’un des titres les plus sous-estimés de Brian De Palma, une œuvre secrète un peu à part et souvent considérée comme mineure à côté de classiques comme Phantom of the paradise, Obsession ou Blow Out. Le film a souvent été considéré comme un moyen opportuniste de jouir à nouveau du succès de Carrie réalisé deux ans auparavant. S’il est bien question d’une jeune femme ayant des pouvoirs de télékinésie, Furie n’a pourtant rien à voir avec Carrie.

Adapté d’un roman de Jon Farris qui signe aussi le scénario, ce thriller fantastique débute par une séquence magistrale de trahison située sur une plage du Moyen Orient. Peter et Ben, des amis de longue date, se prélassent sur une terrasse et évoque le bon vieux temps. Ils abordent vaguement la caractère spécial du fils de Peter, Robin. La caméra tournoie autour des personnages pendant qu’en arrière plan on pressent quelque chose de suspect. Avec un sens aigu du timing et de l’espace, De Palma crée une tension diffuse qui explosera lors de l’attaque terroriste dans laquelle Peter est soit disant laissé pour mort. Le but de cette mise en scène est de kidnapper Robin à des fins politiques. Comme dans beaucoup de films de De Palma, hantés par la trahison, le commanditaire de l’attentat , n’est autre que Ben, chef de film d’une organisation secrète visant à utiliser les pouvoirs psychiques exceptionnels de Robin.
Mais Peter survit et se jure de retrouver son fils. Un an plus tard, une jeune fille découvre qu’elle possède des pouvoirs de médium. Elle est repérée par un programme de recherche. Dès lors, sa vie est menacée. Mais elle est peut être la seule chance pour Peter de retrouver son fils.

Furie est une œuvre hybride à la croisée des genres. Au premier abord, il s’inscrit dans un courant très à la mode dans les années 70, le film politique paranoïaque aux côté de Trois jours du condor ou A cause d’un assassinat. Mais De Palma n’est ni Pollack ni Pakula. L’argument politique, en dépit du pessimisme radical du récit, devient presque secondaire, utilisé comme un Mc Guffin. Le relatif échec public et critique provient sans doute de l’absence d’explication sur l’intérêt de se servir des pouvoirs de ces jeunes X-men. La virtuosité de la réalisation et la dimension émotionnelle du film éclipsent les zones d’ombres et les quelques incohérences qui jalonnent le long métrage.

En mêlant thriller surnaturel et exercice hitchcockien à la manière de La mort aux trousses (les péripéties de Kirk Douglas évoquent celles de Cary Grant), Brian De Palma livre un film lyrique, espiègle, sombre et romanesque parsemé de morceaux de mise en scène uniques. La fuite de Gillian permet à De Palma de rejouer la grammaire hitchcockienne de façon quasi-opératique : étirement du temps, multiplication des points de vue, musique sur-dramatisant le suspense, ralentis savamment utilisés grâce à un montage sophistiqué.

Furie possède un esprit feuilletonesque et hétéroclite qui tranche avec la rectitude de Carrie, très simple dans sa narration mais complexe dans les enjeux, qui le rapproche de certains films de Fritz Lang (les Docteur Mabuse). Les rebondissements incessants ne nuisent jamais à la cohérence de ce beau film fantastique. Ils apportent une énergie, une folie à une histoire œdipienne qui finit par émouvoir. L’extraordinaire et explosif épilogue confirme le goût du cinéaste pour les fins pessimistes et choc, loin du rêve hollywoodien et des happy-end faisandés. Pour ceux qui n’ont jamais vu le film, je ne peux en dire plus mais la multiplication des angles de la caméra pour une même action est un grand moment de cinéma pur, affranchi du bon goût ambiant.

Porté par une interprétation impeccable de Kirk Douglas, John Cassavetes et la très mignonne Amy Irving (femme de Steven Spielberg à l’époque), Furie est une oeuvre à redécouvrir, l’une des plus tragiques et personnelles de son auteur. Pour info, Godard, qui n’était pas un fan de De Palma, a toujours admiré ce film.

(USA-1978) de Brian De Palma avec Kirk Douglas, John Cassavetes, Amy Irving, Carrie Snodgress, Andrew Stevens, Charles Durning

MASTER HAUTE DÉFINITION • 1080/23.98p • ENCODAGE AVC
Version Originale DTS-HD MA 4.0 & 1.0 / Version Française DTS-HD MA 1.0
Sous-Titres Français
Format 1.85 respecté • Couleurs •  Durée du Film : 118 mn

SUPPLÉMENTS :

PRÉFACE DE SAMUEL BLUMENFELD
DU SANG SUR L’OBJECTIF (26 mn)
Un entretien avec Richard H. Kline, directeur de la photographie.
HISTOIRES DE PIVOTAGE (13mn)
Fiona Lewis revient sur son personnage et sur sa dernière scène…culte.
“FURIE” : JOURNAL DE TOURNAGE (48mn)
Sam Irvin revient sur son expérience unique au cœur du tournage et sur la publication de son making-of dans la revue Cinefantastique
ENTRETIENS D’ÉPOQUE AVEC :
Brian De Palma (6 mn)
Frank Yablans (7 mn)
Amy Irving (5 mn)
Carrie Snodgress (5 mn)
DOUBLE NEGATIVE (1984 – Couleurs – 16mn)
Un court-métrage de Sam Irvin, hommage au cinéma de Brian De Palma.
BANDE-ANNONCE

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