Doomsday

Préparez vous, cher lectorat, car cette critique sera exagérément surchargée de parenthèses et de digressions aptes à vous donner le tournis. Ou du moins portera atteinte à la lisibilité du contenu. Attention, ce qui suit dévoile de larges extraits du catalogue VPC…

En écosse, un virus apparaît d’on ne sait où. “La faucheuse” élimine la population  à 90 % en un temps record (Le Fléau) en la pourrissant sur place (insérer un bottin ici). La dernière solution des autorités britanniques face à l’épidémie est de confiner la zone contaminée par un mur infranchissable et qui vivra verra (Resident Evil 2 : Apocalypse… Raté, 28 semaines plus tard). Une trentaine d’années après, quand des photos-satellites prouvent l’existence de survivants dans la zone et que la “faucheuse” ressurgit, une « dragon lady » est envoyée en mission-suicide derrière les lignes de confinement afin de ramener un antidote (New York 1997). 

La guerrière borgne et farouche commandera une escouade dans des véhicules blindés en territoire hostile (Land of the Dead), tombera aux mains d’une tribu vociférante de punks des temps futurs (Mad Max 2, Atlantis Interceptor) menés par un iroquois très rock’n’roll qui harangue ses troupes au micro (Waterworld) puis s’opposera à l’autre faction, un groupe revenu au temps des chevaliers (Excalibur, Beowulf, pas le Zemeckis) entre tirs de pistolets-mitrailleurs et fracas des armes moyenâgeuses (Knightriders). Le morceau de choix dans toutes ces tribulations est une course-poursuite – décevante – dans les grands espaces entre une voiture noire racée à gros moulin (Mad Max, les publicités pour berlines) et des autos-motos tunnées façon petits Geronimo de l’apocalypse (Mad Max 2, rebelote). N’en jetez plus !

Ce n’est pas un secret, Neil Marshall a toute la bienveillance de Cinétrange. Certains ont même gouté à son hymne au lycanthrope, le pittoresquement faiblard Dog Soldiers (la rédaction ne sera pas unanime dessus, j’en connais un qui doit encore piétiner les miettes du DVD). Par la suite, il est manifeste que le cinéaste a secoué la sphère fantasticophile grâce à The Descent. Inutile de revenir sur cette bombinette pré-néo-survival (sortit avant La Colline a des yeux d’Alexandre Aja, bien avant la vague que l’on connait ces dernières années), qui augurait du meilleur concernant l’avenir de cet anglais très énervé de la caméra.

Débarque ensuite le très (trop) attendu Doomsday en janvier 2008, et là, première constatation : le réalisateur s’est bien amusé. Il a du faire sienne la fameuse formule d’Orson Welles qui comparait le cinéma et le train électrique. La faiblesse (ou l’épine dorsale) de Doomsday réside dans une appellation fort tendance de nos jours dans les papiers des critiques : le film de geek ou fanboyisme. Doomday est comme je l’ai annoncé, le catalogue, en veux-tu en voilà, de toute une portion du cinéma de ces trente dernières années. Une déclaration d’amour indéfectible et sincère à un genre en particulier, genre que nous adorons aussi, le post-apocalyptique. Toutefois, nous sommes ici à l’exact opposé de la cohérence d’un The Descent. Nous pouvons élargir les références disparates au bandes horrifiques (les punks sont cannibales). Nostalgie quand tu nous tiens, jusque dans la bande originale orientée années quatre-vingt anglaises (Franky goes to Hollywood, Siouxsie and the Banshees, Fine Young Cannibals !). Il est facile d’imaginer Marshall avec un large sourire, impatient à l’idée de plaquer ses morceaux favoris d’adolescent de Newcastle dans la tracklist du film.

Là se situe tout le paradoxe, ce film si personnel ne l’est pas tant que cela, à la réflexion. Contrairement à un Quentin Tarantino qui dans Kill Bill, même s’il décalquait compulsivement, filmait du Tarantino, tel un artiste s’exerçant au collage mais gardant sa « patte » (au point, plus tard, d’avoir définit Boulevard de la mort comme un essai, au sens littéraire, de l’auteur Tarantino, en détournant la devanture grindhouse qui était vendue au public), Marshall ne se réapproprie pas les œuvres mais les enquille, en diluant leur impact. Soit l’amateur est atterré par ce manque d’ambition et de rigueur avec une amorce aussi ébourrifante et passe l’éponge, saturé par cette mode du référentiel qui dérape vers le révérenciel, soit il salue la démarche (Marshall joue cartes sur table) et profite du spectacle. À l’ancienne, sans numérique surajouté. Il y a ce que l’on veut et en larges doses, sauf de la transcendance.

Absolument inégal d’une scène à l’autre, ce qui coule de source vu sa confection et l’esprit qui l’a dirigé, Doomsday a pour consigne de filer à cent à l’heure, sans se poser de question. Rhona Mitra (prochainement dans Underworld 3 : Le soulèvement des Lycans) ne remplace pas l’anthologique Snake Plissken incarné par Kurt Russel mais s’avère être une actrice adéquate dans ce genre de rôle de fille à poigne (elle a figuré comme l’une des Lara Croft officielles, si ce n’est pas un signe…).

Le tout sera de statuer si après son “hommage” certes copieux, mais chaussé de sabots de plomb, Marshall réussira à inventer de nouveau son propre cinéma plutôt que de piocher dans celui d’antan, aussi glorieux fut-il.

Sortie DVD le 22 octobre 2008.

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