Le Feffs 2015 de Mister K.

The Green Inferno

De retour au FEFFS et déjà une soirée d’ouverture pleine de promesses a priori. Un double programme Eli Roth (Ahhhhh !) : Knock knock (Mouais ! au vu de la bande-annonce) et The green inferno. Le premier ayant été traité par Jo Gonzo dans cette chronique (j’y reviendrai cependant très brièvement à la fin de ce papier), je vais m’attarder sur le deuxième opus rothien.

Cela fait déjà un moment que le film fait parler de lui : 2013, avant-première au festival de Toronto, puis New York en 2014, sortie officielle en 2015 aux USA, visible en Europe depuis le festival de Deauville cette année, sortie en VOD en octobre très prochainement. C’est bien normal, c’est un film de cannibales… à l’ancienne, qui rend un hommage à toute une production italienne plus ou moins réussie des années 1970 et 1980 (Umberto Lenzi et Ruggero Deodato en tête). Eli Roth est un cinéphile averti – grand collectionneur de VHS, DVD et bobines entre autres – et cela se sent dans tous ses films inspirés des oeuvres marquantes du cinéma de genre des années 1970.

Je crois qu’il va falloir se rendre compte qu’il est un des rares réalisateurs à parler de notre société contemporaine dans ses films tout comme l’excellent Rob Zombie auteur d’un remake de Halloween à faire pâlir The big John. Hostel I et II  étaient (dégueulasses, je le concède) des critiques de notre société capitaliste – on peut spéculer sur tout et pourquoi pas sur des humains ? – The green inferno évoque plutôt une critique de la bonne conscience occidentale écologiste, ici celle d’étudiants issus de milieux aisés qui veulent faire une action concrète pour préserver la planète. Sauver la forêt au Pérou et ses tribus indiennes. Le ton est cynique tout au long du film : l’étudiant charismatique qui a monté le projet n’est finalement qu’un minable type égoïste et toute la troupe embarquée dans cet enfer vert se retrouve bien seule, une fois que l’avion qui les ramenait au point de départ de leur voyage s’écrase dans la jungle. Aïe, les ennuis commencent pour les jeunes gens capturés par des Indiens puisque les autochtones se trouvent être des cannibales.

The Green Inferno

A cet instant du film, un ange passe dans la salle. Il m’a semblé que tout le monde a retenu son souffle et s’est dit : « Ouh là là, il va nous faire des plans bien crados et réalistes sur la façon dont les étudiants vont se faire bouffer ». La scène d’entrée au village m’a terrifié. Eli Roth utilise des plans à l’épaule, une image floue, une mise au point sur des détails déroutants (crânes, cadavres en putréfaction), des indiens recouverts de sang – une couleur mise en avant par la superbe photographie du film, tout cela dans un format 2.35 bluffant (ce film est à voir au cinéma, il risque d’être décevant devant son ordinateur 13 pouces). On s’identifie aux prisonniers des cannibales mais que nenni au niveau des scènes insoutenables ! Eli Roth joue avec nos nerfs, il nous montre beaucoup de scènes gores durant une heure environ mais elles sont surtout drôles (le crash de l’avion, les morts dans le village indien). Seuls l’énucléation et le démembrement d’un étudiant tendent vers un gore réaliste.

Et Cannibal Holocaust alors ? Le film lui rend hommage évidemment à travers la présence de cet enfer vert. La jungle est présente tout au long du film et la couleur verte explose sur l’écran mais pas de found footage à l’horizon, ni de tortures d’animaux vivants (la dérangeante scène de la tortue…), ni de musique envoûtante comme celle de Riz Ortolani. Il propose une remise en question de notre modèle de pensée occidentale vis-à-vis de la nature et met à mal un concept fourre-tout comme le développement durable.

Knock knock essaie de mettre en avant un discours critique mais là sur l’American Way of Life. Cependant, il n’a pas autant d’intérêt (ça sent le déjà vu). Deux choses cependant ont retenu mon attention : la photographie et les décors. Ces deux éléments sont magnifiés tout au long du film et m’ont fait penser aux films italiens des années 1960, 1970 et du début des années 1980. Ténèbres d’Argento (la maison vide, la sobriété des décors), les oeuvres de Fulci (couleurs) et autres gialli me paraissent être de larges sources d’inspiration de ce film bien en-dessous de ce qu’a pu concocter Sir Roth durant sa carrière.

Les Révoltés de l’An 2000

La rétrospective principale du FEFFS cette année avait pour nom Kids in the dark, thème classique sur les enfants dans le cinéma fantastique Plusieurs perles comme Le village des damnés ou Sa majesté des mouches étaient programmées. Et puis il y avait aussi cet intriguant classique  du cinéma fantastique espagnol, Les révoltés de l’an 2000 que j’ai vu il y a bien longtemps à la TV, certainement sur Canal +.

Le pitch paraît simple : une île mystérieuse sur laquelle se rendent Tom (Lewis Fiander, un acteur  qui ressemble plus ou moins à Jean Reno) et Evelyn (sa femme enceinte) deux touristes anglais en vacances sur la Costa espagnole après un bref séjour à Benahavis, petite station balnéaire locale. Ce couple va rencontrer sur cette île dénuée d’adultes des enfants très inquiétants. Il s’avère que ceux – ci ont tué tous les adultes de l’île.

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Réalisé en 1975, primé à Avoriaz en 1977, visible seulement en  VHS dans les années 1980 puis ressorti en DVD dans une belle édition Wild Side en 2008, ce film de Narciso Ibanez Serrado a une réputation sulfureuse. Le titre original du film est «  Qui peut tuer un enfant ? » et résume finalement très bien le propos de l’oeuvre. Le générique très lourd évoque tous les enfants qui sont morts lors de différents conflits (Seconde guerre mondiale avec la photo de l’enfant juif de Varsovie prise pendant l’insurrection du ghetto de Varsovie en 1943, guerre du Vietnam ou encore la guerre du Biafra au Nigéria à la fin des années 1960) et nous rappelle que l’humanité a fait beaucoup de mal aux enfants – et ce depuis toujours comme le suggère ce prologue. Placé en épilogue, il aurait eu  un impact beaucoup plus fort sur le spectateur. Cependant, son seul intérêt est de justifier le propos du film : et si tout s’inversait, et si les enfants s’en prenaient aux adultes ?

Les 20 ou 30 premières minutes (sorte de documentaire sur la vie dans une ville de la Costa espagnole l’été dans les années 1970) semblent insignifiantes mais posent les bases du propos de l’intrigue. Les deux touristes semblent perdus, étouffés par ces milliers de personnes qui participent aux fêtes locales. Cette situation annonce les événements sur l’île mystérieuse dont Tom et Evelyn ne pourront pas s’échapper.

Certes, le thème des enfants dans le cinéma fantastique est quelque chose de commun mais le film de Serrado perturbe le spectateur et ce pour plusieurs raisons. On suit le couple de touristes infantilisé lors de son arrivée sur l’île (ils ont une envie de prendre une glace, ils boivent des sodas) alors que les enfants – mutiques – semblent pouvoir communiquer sans se parler (inquiétants, je vous dis !). Ils utilisent des armes comme des adultes et ont une attitude très violente (ce sont des assassins) envers ces deux touristes égarés et prisonniers. La réalisation fait la belle part aux plans serrés, à la lumière aveuglante, au montage (comment ces enfants font – ils pour se déplacer si vite ? ) pour oppresser le spectateur qui ne peut que s’identifier au couple qui vit un véritable calvaire une fois la prise de conscience que ces enfants ne sont pas comme leurs chères petites têtes blondes (ils sont parents de deux enfants, apprend-t- on au début du film). La mort d’Evelyn par son propre enfant (encore foetus) est une scène très dure à éprouver en tant que spectateur. On se trouve enfermés dans la même pièce que son mari qui, un peu avant, a dû abattre un enfant de 6/7 ans qui voulait lui tirer dessus et qui voit sa femme mourir. Scènes étouffantes et très efficaces.

Pas de scène gore, pas d’effets spéciaux réalistes à outrance. Tout ceci est sans intérêt dans cette oeuvre phare des années 1970 qui joue sur l’économie des effets. Inutile car l’idée de départ est suffisante.

Film original, Les révoltés de l’an 2000 trouve cependant son inspiration dans plusieurs oeuvres. En tête, Les oiseaux d’Hitchcock : impossible de ne pas y songer tant les enfants muets se déplacent toujours en groupe (voire meute, ils devaient être des centaines sur le tournage) et regardent intensément leurs … proies. Difficile de ne pas penser non plus à Rosemary’s baby à travers deux éléments : une ritournelle utilisée durant le film et la figure de la femme enceinte (rousse, blanche de peau et matrice du Mal). Une autre référence évidente est La nuit des morts-vivants qui présente le même type de fin ironique (ici le touriste anglais se fait tuer par la police qui n’a bien sûr rien compris).

Film fascinant et effrayant surtout lorsque l’on vient d’avoir des jumeaux qui ont 8 mois maintenant.

Joe Dante Forever

Le FEFFS avait un invité d’honneur de marque cette année : Joe Dante. Wouahouh! C’est avec des étoiles dans les yeux que je me suis rendu à sa Master Class le dimanche 20 septembre. Interviewé par l’excellent Jean-Baptiste Thoret, cette séance exceptionnelle a tenu toutes ses promesses.

L’après-midi démarre par quelques minutes du très bon téléfilm The Second Civil War produit par HBO en 1997. L’extrait présente le problème des réfugiés vu par les médias et se révèle très actuel. C’est un des films favoris de Mister Joe qui fait un lien entre cet extrait et le programme proposé par Donald Trump aux USA (entre autres idées farfelues, la construction d’un mur de plusieurs mètres de hauteur sur la frontière américano-mexicaine financée entièrement par les Mexicains). Ses films sont souvent politiques même s’ils prennent l’allure de comédies (plus ou moins familiales) ou de blockbusters. Cependant, cela fait un bout de temps que Joe Dante semble avoir disparu du système hollywoodien (depuis Small soldiers sur le plan artistique ?) mais il nous avoue qu’il est toujours là avec les mêmes idées et les mêmes envies mais qu’il fait des films plus petits et moins ambitieux.

Il explique avec une certaine nostalgie l’évolution du cinéma qui a un visage bien différent de celui de son enfance. Il évoque évidemment les « matinées » où il passait ses samedis après-midis à regarder des films avec ses copains. Cette nostalgie l’a poussé à réaliser Panic sur Florida Beach (Matinée en VO, son meilleur film à mon goût), un des plus beaux hommages au cinéma, ici le  bis américain des années 1950 et 1960, sur fond de guerre froide et dont les protagonistes principaux sont un enfant et le producteur Laurence Woosley, personnage qui rend hommage au vrai producteur William Castle.

Joe Dante est attaché à ses personnages, ses films sont tournés vers eux et Jean – Baptiste Thoret, en forme ce dimanche, ose comparer le réalisateur à Wack, extraterrestre à l’allure improbable du film Explorers (un échec commercial) qui se souvient de tout (une version du cinéphile pathologique qu’est Dante).

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Joe Dante est une des mémoires d’Hollywood, sa vie est tournée vers le cinéma et ce depuis tout jeune. Sa carrière commence dans les années 1960 où il participe à des fanzines. En 1966, il réalise The movie Orgy, compilation de ses références favorites. Il est engagé chez Roger Corman dans les années 1970 où il apprend à faire du cinéma. Il démarre en faisant du montage de bande-annonces de films puis Corman le lance en 1978 dans Piranhas, hommage (remake?) à Jaws qui s’en détache par son propos politique et satirique sur les USA. Un succès très important qui lui a permis de concocter l’excellent Hurlements en 1981 : un petit budget, des effets spéciaux impressionnants et toujours une remise en question de la société américaine.

Spielberg le remarque à ce moment. Il lui propose le scénario de Gremlins et un épisode de Twilight zone, the movie : film à sketchs très inégaux vu la veille au cinoche. Tout le monde se rappelle de l’introduction très étrange et de la fin qui fait réapparaître le personnage du départ qui n’est autre qu’un loup-garou. Le premier sketch est signé John Landis (le meilleur au niveau de l’esprit de l’adaptation de la mythique série TV). Pour le deuxième, Spielberg est aux commandes et c’est le moins bon des 4 sketchs. Georges Miller est l’auteur de la quatrième partie, remake d’un épisode emblématique de la série (un avion pris dans un orage), bien fichu dans sa réalisation avec un John Lithgow toujours aussi inquiétant. Le troisième moment  est l’oeuvre de Joe Dante. Très étrange, cette partie ne fonctionne pas (le scénario est trop prévisible) mais  elle est visuellement très riche (c’est le sketch préféré de Thoret). Un enfant est renversé par une jeune femme qui lui propose de le ramener chez lui. Erreur ! La petite tête blonde est dotée de pouvoirs qui lui permettent d’enfermer sa famille dans sa propre maison. Le dessin animé est au coeur de cet épisode, c’est l’une des formes artistiques préférées de Dante qui voulait être dessinateur de cartoons lorsqu’il était jeune. Il propose un univers délirant et oppressant pendant 20 minutes.

Difficile de ne pas évoquer Gremlins pendant cette Master Class. Ce film est avant tout pour Dante un hommage à La vie est belle de Capra et un retour à sa propre enfance, lui qui a grandi pendant les années 1950 en pleine guerre froide dans une banlieue typique américaine, sorte de stéréotype de lAmerican Way of Life. Le cadre de cette histoire va littéralement exploser au fur et à mesure de la propagation des Gremlins. Les ingrédients qui ont fait le succède de Dante à la fin des années 1970 vont rendre ce film mythique pour tous les gamins qui ont vécu dans les années 1980.

Il manque un élément essentiel à ce billet : Dick Miller. Joe Dante a grandi avec cet acteur présent dans les nombreux films qu’il a vus plus jeune. Il l’a ensuite côtoyé lorsqu’il était dans l’écurie Corman. Dick Miller a joué dans tous les films de Dante. Il avoue durant la Master Class que c’est son porte-bonheur.

Lui a-t-il porté chance pour son dernier film Burying the ex ? Je ne vais pas m’étendre sur ce point, Jo Gonzo l’a très bien fait dans sa chronique. J’ai juste une impression que Dante est un auteur schizophrène : d’un côté, cinéphile, fin, passionnant, curieux mais d’autre part un réalisateur peu inspiré dans ce nanar de fin d’après-midi où les petites allusions au cinéma bis dans ses précédentes oeuvres prennent une place énorme et façonnent un film qui ne se préoccupe pas vraiment des quatre personnages principaux (ça tourne beaucoup en rond).

Je regagne mes pénates, heureux, ému par ce long entretien d’un auteur dont l’oeuvre a jalonné ma cinéphilie, J’ai une furieuse envie de revoir L’aventure intérieure.

The Lobster

Au FEFFS, on est vite fatigué par le nombre conséquent de films visionnés mais la programmation vaut toujours le coup d’oeil. Un soir de milieu de semaine, ma curiosité s’est portée vers The Lobster du grec Yorgos Lanthimos.

En quelques mots, le film est une dystopie. Dans un futur proche, il est impossible de rester  seul dans notre société. Les malheureux célibataires ont 45 jours pour trouver un partenaire sinon ils se voient transformés dans l’animal de leur choix. Le homard est l’animal choisi par Colin Farrell qui campe une sorte d’anti-héros usé par sa situation.

Excellent, brillant, génial, il m’est difficile d’utiliser tous les superlatifs pour parler de l’excellente prestation de l’irlandais qui a porté la plus vilaine perruque blonde de l’histoire du cinéma (certains vont me contredire en proposant le travail capillaire plus qu’approximatif accompli lors du tournage de Vercingétorix et n’auraient pas tort…). Disons-le tout net, Farrell est un acteur hors-norme. Il l’a prouvé dans Le rêve de Cassandre, Bons baisers de Bruges et la deuxième saison de True Detective. Il confirme à mes yeux tout son talent dans ce film grec qui a remporte le prix du Jury à Cannes cette année. Hésitant, inquiet, bedonnant, portant une moustache à faire pâlir Tom Selleck, Colin Farrell porte admirablement le film sur ses épaules pour nous faire découvrir l’horreur de cette société qui n’accepte pas les célibataires. Cet antihéros, pas si nul que cela au final, va échapper à sa situation de mise à mort certaine en s’évadant de cet hôtel, métaphore de l’enfermement, de l’individualisme  et référence évidente à l’Overlook Hotel, prison (mentale ?) par excellence. Il va rejoindre un groupe de résistants à cette situation sociale intenable. Dans la forêt, il va découvrir l’amour (interdit pourtant) grâce à la sublime Rachel Weisz (premier rôle dans  le trop sous-estimé Agora).

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Le film est porté par d’excellents acteurs et a un propos très fort en ces temps de crise économique et de questionnement sur le mode de fonctionnement de notre société occidentale. Ce n’est pas un hasard s’il a été primé à Cannes cette année (Prix du Jury s’il vous plaît). Le réalisateur le sait bien, il est grec. Il évoque la déconstruction de la société dans notre modèle occidental où les relations sociales (réelles) sont de moins en moins présentes de manière globale. Pour moi, Yorgos Lanthimos lance un évident cri d’appel à la liberté en essayant de mettre un peu d’humanité  (de l’amour) là où il n’y a plus que des chiffres à la place d’humains, des statistiques, des relations via internet. L’Europe et plus largement l’Occident se trouve face à des défis immenses comme la crise économique, l’arrivée et l’intégration de migrants pris dans des conflits, la montée d’une droite dure, reconstruire un projet politique qui parle à tout le monde, la COP 21 mais aussi recréer le vivre-ensemble qui semble être compromis dans la réalité et avoir disparu dans cette dystopie.

Un point artistique important. Le film est servi par une photographie magistrale qui sert les ambiances voulues par le réal’ dans différentes scènes (les tons pâles dans l’hôtel, les clair-obscurs dans la forêt). Il vous marquera davantage si vous avez la chance d’aller le voir au cinéma tout comme The green infernoThe lobster est le quatrième film de Yorgos Lanthimos et j’ai envie de découvrir ses trois opus précédents.

Double programme Castellari

Cette année, le président du FEFFS n’était rien de moins qu’Enzo G. Castellari, roi du cinéma bis italien dans les années 1970 qui a pratiqué presque tous les genres. Une soirée spéciale lui était consacrée où l’on pouvait visionner deux pépites : Le témoin à abattre réalisé en 1973 et Tuez-les tous…et revenez seul ! (1968). La deuxième partie étant beaucoup moins intéressante à mes yeux (il vaut mieux  se procurer Keoma, dernier grand western spaghetti), j’évoquerai simplement quelques aspects du poliziottesco.

Prologue très intéressant à ce double programme, Enzo himself est interviewé par Christophe Lemaire, critique ciné à Starfix, Mad movies entre autres et encyclopédie vivante sur le cinéma. Castellari  commence par rappeler son amour du cinéma,  transmis par son père Marino Girolami, réalisateur de nombreux films  dont le plus connu est Le talon d’Achille (1961). S’ensuit un retour rapide sur sa carrière (Keoma, The big Racket, La mort au large, Touareg) qui donne envie de tout revoir même Les guerriers du Bronx ainsi que sa suite avec l’un des acteurs les plus inexpressifs du monde, Marc Grégory. Lemaire revient ensuite sur le fait que Castellari a touché à tous les genres sauf le film d’horreur. Le président d’honneur avoue détester cela et a laissé d’autres maîtres s’en occuper, en tête Lucio Fulci. Une info importante à la fin de cet entretien : il a un projet sérieux plutôt avancé qui serait un hommage à la série B. On a hâte de voir ça !

Quel plaisir de voir Le témoin à abattre ! Le film est diffusé en 35 mm, la bobine est usée mais pas hors d’usage, la VF n’est pas forcément bien calée et le son crépite de temps à autre : les conditions sont parfaites pour visionner  les 90 minutes d’un polar italien bis typique des années 1970.

A Gênes, les organisations criminelles imposent leur loi. Le commissaire Belli décide de faire face à ces criminels mais se heurte à sa hiérarchie incompétente et doit faire face à la vengeance des  notables de la ville qui ont peu apprécié d’être mêlés à l’enquête du commissaire.

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Enzo G. Castellari est surnommé dans le milieu du cinéma le Peckimpah européen. A tort ou à raison. Ces films sont l’oeuvre d’un auteur à la réalisation efficace, au service de l’action. Le début du film est marqué par un très beau plan-séquence, travelling avant qui nous amène sur le port de Gênes. Ce moment sera réutilisé à la fin pour amener le gunfight de la séquence finale. Castellari va utiliser les ralentis mais sans en abuser pour amener de l’émotion lors des tueries perpétrés par la situation invivable à Gênes. Le film s’est fortement inspiré de French connection (1971) :  les poursuites en voiture font indéniablement penser au chef-d’oeuvre de Friedkin, Fernando Rey est présent également et se trouve être la tête pensante de la mafia à laquelle le commissaire doit faire face. Le témoin à abattre est un poliziottesco de bonne facture, efficace et plaisant à découvrir.

Impossible de parler de ce polar sans citer Franco Nero, acteur fétiche de Castellari qui incarne ici le policier qui va partir en croisade contre la mafia et les institutions corrompues. Ses yeux d’un bleu profond, sa moustache, son pardessus sont omniprésents dans le film. Il incarne la justice et le bon droit des citoyens, il va utiliser tous les moyens (la vengeance et la violence) pour remettre de l’ordre dans la cité génoise. Cette idéologie nauséabonde a valu à ce type de polars d’être descendus par la critique durant les années 1970.

Ce film m’a beaucoup fait penser au seul polar de ce genre réalisé par Lucio Fulci, maître de l’horreur, La guerre des gangs dont le DVD est sorti chez Ectasy of films en 2013.  Il a réussi à renouveler un peu le genre en y incluant des scènes gore.

Emouvant de voir Castellari parler de son travail puis d’avoir la chance de visionner deux éléments de son oeuvre, ce type de séance de cinéma est rare et je remercie le FEFFS de m’avoir fait ce présent.

 

Soirée excentrique !

Une soirée excentrique au FEFFS, j’avais hâte de voir ça. Le deuxième samedi soir est toujours consacré à une nuit à thème : c’était Cannon testostérone l’an passé, soirée qui restera comme une des plus drôles que j’ai pu passer. Jo Gonzo expliquait les raisons du succès de cette soirée dans cette chronique. Une nuit qui commence pour ma pomme par un élément très excentrique, Yakuza Apocalypse.

Quelques mots rapidement sur ce film de clôture qui ne m’a guère emballé (j’ai déjà eu cette impression l’année dernière avec Prémonitions). Curieux de voir le dernier Takashi Miike, j’ai été très vite déçu. Le film est coupé en deux, un première partie un peu pénible sur le quotidien d’un quartier qui subit la loi des yakuzas et sur la montée en grade d’un des yakuzas qui devient vampire et accessoirement le boss (il a été mordu par la tête de l’ancien chef). Une deuxième partie parsemée de combats entre le vampire et divers adversaires (un Van Helsing asiatique, un homme grenouille qui porte un déguisement ridicule de grenouille). Le film alterne séquences de combats bien fichus et moments où l’on s’ennuie ferme. Je crois que j’avais la tête à la suite du programme.

Jean-Françaois Rauger (himself), directeur de la programmation de la cinémathèque depuis 1992, vient en présenter les principes (elle a déjà eu lieu à Paris) : des nanars intersidéraux sont proposés, des bande-annonces de films bis des années 50, 60, 70, 80 issues de tous les pays présentent ces perles rares.

Cela fait très longtemps que je n’avais pas ri autant. Le manoir hanté, Le colosse de Hong Kong, Justice de flic (le meilleur rôle de Claude Risch ? Le premier rôle de Frank Dubosc ?), Blessure (avec Florent Pagny, jeune et fou), Les rats de Manhattan, Au karaté takarataké, Il faut battre le chinois tant qu’il est encore chaud. Oui, tous ces films existent et valent le coup d’oeil pour tout amateur de bis.

Ces belles mises en bouche ont précédé Howling II et Suède, enfer et paradis. Vous connaissez Hurlements de Dante ? Et bien sa suite n’a rien à voir. L’histoire : un homme enquête sur la mort de sa sœur et découvre qu’elle était membre d’une secte de loups-garous …en Transylvanie. Aidé par un homme mystérieux, lui et sa femme vont se rendre en Transylvanie.

Christopher Lee a eu une longue carrière et s’est retrouvé de temps en à autre dans des films improbables. Celui-ci remporte le pompon. Une histoire bancale, une réalisation de Phillipe Mora pas terrible (il a repris pas mal de plans de Hurlements pour ne pas s’embêter avec les effets spéciaux), des acteurs peu convaincants (Sybil Danning, Reb Brown), une Transylvanie pas effrayante du tout, un Christopher Lee au look improbable dans une boîte de nuit où la musique punk-new wave est de mise. Bref, une bonne tranche de rigolade avec une mention spéciale pour le montage : tous les effets de transition entre 2 plans ont été utilisés. A un moment, on se serait cru dans un powerpoint  géant (toute la salle a apprécié le travail par des AHHHHHHH !).

Le seul intérêt du film : le générique de fin où l’on peut voir 17 fois (toute la salle a compté) la poitrine généreuse de Sybil Danning.

Deuxième acte : Suède, enfer et paradis. Mondo réalisé par Luigi Scattini en 1968, ce navet a pour seul objectif de montrer des filles plus ou moins nues sous prétexte de nous parler d’une société scandinave ouverte sur la modernité. Opus très étrange car à plusieurs moments je ne savais pas très bien ce que je voyais  à l’écran. Mention spéciale aux commentaires réactionnaires du narrateur qui en ont fait hurler de rire les spectateurs.

Il est 6 heures, j’ai abdiqué pour La comtesse Hachisch, nanar réalisé en 1935 dont on ne sait pas grand-chose, même si j’ai très envie de voir une nouvelle session de bande-annonces toutes plus incroyables les unes que les autres (j’ai rêvé de voir un film avec le Sardou des années 70 et ses Ray Ban). Retour à la réalité après une semaine de cinéma bien éprouvante mais tellement nécessaire pour tout cinéphile strasbourgeois. Et petite info, Jean-François Rauger a parlé d’une nouvelle soirée excentrique l’année prochaine au FEFFS. J’ai déjà hâte d’y être.

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